Au Sud de Rouen, sur les rives de la Seine et de l’Eure, se dresse Pont-de-l’Arche, petite cité Normande de quelques 5000 habitants. Érigée au IXe siècle au sortir d’un pont en bois fait de 22 arches pour résister, en vain, aux raids des Vikings, Pont-de-l’Arche est aujourd’hui une ville résidentielle sous l’influence de l’aire d’emploi de Rouen. Là, réside un club de rugby, le RC Pont-de-l’Arche créé en 1977 par le président Max Fournier et fort de 110 licenciés. En 2011, le RC Pont-de-l’Arche (RCP) remporte à Lisieux la finale de 4e série l’opposant au club de Brionne / Risle après prolongations et une séance de tirs au but mémorable (11 à 10). Dès lors, commence l’épopée des phases finales des championnats de France qui devait mener cette bande de copains en demi-finales.

Des voyages, des rencontres et des souvenirs pour la vie

L’émotion collective de la victoire

Rarement confronté à des équipes extérieures au comité de Normandie, le RCP attend avec beaucoup d’excitation leur premier match de championnat de France. Échappant aux barrages et directement qualifiés, pour les 1/16e de finales les Archepontains rencontrent le club breton de Landerneau. Vainqueurs sans trop de difficulté, ils ont rendez-vous le week-end suivant à Chablis pour y rencontrer le club du Lyonnais, le RC Amplepuis. Curieusement l’appartenance de ce club à un « grand » comité générait davantage d’inquiétude que la perspective d’affronter le champion de Bretagne. Au moins se disaient-ils, le voyage vers Chablis, célèbre commune du département de l’Yonne en Bourgogne Franche-Comté, laissait augurer d’un retour animé, que le match soit gagné ou perdu. L’insouciance conduisait la bande au président d’alors Jean-Luc Leudier à aborder cette rencontre comme la dernière d’une saison déjà très belle et inespérée. Que nenni ! le rugby rugueux de leurs adversaires cimenta les Archepontains et avec une grande solidarité ils remportèrent leur 1/8e de finale. La réception d’après match fut titanesque, le président du club de rugby de Chablis, ayant eu la bonne idée de l’organiser dans une cave abritant au frais le célèbre vin blanc sec à base exclusive de Chardonnay. Direction les quarts contre Château-Thierry champion des Flandres (Aisne) à Crépy en Valois. Point de spécialité à se mettre sous la dent ou dans le gosier, mais l’absence d’exotisme n’enleva pas l’enthousiasme des Archepontains qui remportèrent cette rencontre.

La folle espérance d’une finale

Une aventure transmise à toutes les générations

Cabossés, perclus de crampes, mais gonflés à bloc, les Normands scrutent le site de la FFR et le Midol du lundi matin pour savoir quelle sera leur prochaine victime : l’US Capvern. La pression absente lors des premières joutes s’était largement accentuée dès les 1/8e de finale, le RCP étant le seul club normand rescapé des phases finales du championnat de France. Dès lors, de très nombreux soutiens provenant de toute la Normandie figèrent les Archepontains dans une posture inédite pour eux. Ils représentaient le rugby normand en demi-finale du championnat de France !! A un match de la finale et du « bout de bois » que tout un chacun des rugbymen rêve de toucher un jour, les joueurs avaient changé de statut. L’insouciance d’un groupe de potes porté sur le plaisir et la convivialité cédait le pas à une équipe désormais confirmée dans son rôle d’invaincu. Oui, mais en face se présentaient les Capvernois, sorte de maison de retraite d’anciens de la section paloise (Top 14) et du RC Lannemezan (1DF) qui profitaient sans doute des thermes pour se ressourcer. L’affaire fut vite entendue et pliée en faveur des gens du plateau. Fin de l’aventure pour les Normands !

Le devoir de mémoire, le 4 juillet 2021

S’il fallait encore une preuve de l’importance des phases finales du championnat de France pour un club amateur « pur jus », il n’y a qu’à se pencher sur l’engouement que suscite dix ans après cette aventure, la fête commémorative organisée par le RCP le dimanche 4 juillet 2021. De toute la France et même de l’étranger tous les acteurs de ces phases finales vont se retrouver pour se rappeler, échanger, rire et nécessairement épancher la soif que leur procurera les nombreux récits des anecdotes des uns et des autres. A la veille de la réforme des compétitions imposée par la FFR, le RC Pont-de-l’Arche, par la voix de son président, Kévin Tonnelé, sait que cette épopée de 2011 ne se reproduira pas de sitôt à moins de s’offrir les services de deux tongiens, un fidjien, quatre georgiens, deux « Sud-Af » ….. La fête de dimanche risque de ressembler à une armoire à souvenirs, (normande l’armoire !) que l’on retrouvera au salon des Antiquités fédérales. Sale coup que cette réforme pour l’attractivité d’un club de série territoriale en terres Viking !

Laissez un commentaire